Fou d’amour est le dernier film de Philippe Ramos,
avec Melvil Poupaud et Dominique Blanc, produit par Paulo Branco :
- tourné en 2K avec une Alexa, en 2K APR444 (LogC)
- monté à 100%, online, dans Final Cut Pro X…
Les USA n’ont pas le monopole de la modernité technique ! Après Diversion (« Focus », titre original), fiction hollywoodienne montée et postproduite sur Final Cut Pro X (lire notre article à ce sujet, ou la page Apple consacrée au film)…voici donc un long métrage français entièrement monté sur Final Cut Pro X.
Nathalie Sanchez, assistante monteuse et conseillère technique,
nous raconte tout.
Nathalie Sanchez, quel a été ton rôle sur ce film ?
Sur ce film, j’étais assistante et « consultante » monteuse. En effet, Philippe Ramos monte lui-même ses films et je lui sers de deuxième regard.
Quel était le format de tournage de Fou d’Amour ?
Le film a été tourné avec une caméra Alexa de chez ARRI, en 2K APR444 LogC.
Pourquoi Final Cut Pro X pour une fiction en 2K ?
C’est moi qui ai parlé de FCPX à Philippe, je venais de finir le montage d’un documentaire (Buren dans la ville de Emérance Dubas) et étais définitivement séduite par cet outil.
Je lui ai fait une petite journée de démonstration/pratique et il a été lui aussi convaincu par la maniabilité, la fluidité, l’impression que l’idée et le geste de montage s’enchaîne naturellement.
Convaincre… des résistances ?
Il a ensuite fallu convaincre la production et nous nous sommes heurtés à une certaine résistance. Le logiciel de montage du cinéma en France, c’est forcément Avid.
Je leur ai donc exposé le workflow largement simplifié que pourrait nous autoriser FCP X :
-pas de confo image
-pas de confo son
-accès direct aux rushes et possibilité de pré-montage pendant le tournage sans l’établissement fastidieux et couteux d’une navette pour le transcodage des rushes (nous tournions loin de Paris).Il a également fallu résister aux avertissements des amis monteurs ou assistants et les convaincre eux aussi que oui, il était possible de monter un long métrage avec FCP.
Le workflow était… simple ?
Le workflow a été très simple.
Les cartes étaient déchargées tous les soirs et l’assistante caméra nous donnait un des disques de back-up.
Les rushes étaient ensuite copiés sur le disque RAID interne de la tour de montage.
Ils étaient alors immédiatement disponibles puisque nous montions en natif et en pointant vers les rushes.
De plus, Final Cut Pro X applique automatiquement la LUT arri logC, avec un système on/off si on veut retrouver le rushe original.Philippe Ramos a pu ainsi, même si les rushes n’étaient pas encore synchronisés bien sûr, construire des maquettes de certaines séquences problématiques et décider de la pertinence d’un retake par exemple.
Et pour la gestion du son ?
Le son a été enregistré sur un Nagra en 8 pistes et transformé en polys.
Pour la synchronisation, j’ai utilisé la waveform puisque j’avais un son témoin caméra.
Le TC glissait et n’était pas fiable. Là aussi, j’entends dire qu’une synchro à la waveform c’est pas bien… Pourquoi? Nous n’avons eu aucun problème de synchro ! Aucun.J’ai synchronisé les polys, je n’avais donc qu’un objet son avec les 8 pistes incluses et disponibles.
Sur la timeline, un rush synchro se voit comme un seul objet incluant les images et le mixage des 8 pistes son (seules les pistes activées sont audibles) et l’on peut, si l’on veut, retrouver une configuration développée où chaque élément est accessible.
Pour n’entendre que le mixdown, il suffisait de « muter » les autres pistes dans l’inspecteur.
Mais on pouvait aussi choisir d’autres pistes au montage puisque nous les avions toutes.
Quelle organisation dans Final Cut Pro X ? rushes, événements,…?
La bibliothèque contenait trois évènements :
-un événement Rushes originaux où les rushes image et son étaient classés dans des mots-clés par jour de tournage.
-un événement Montage dans lequel se trouvaient les rushes synchro classés dans des collections de mots-clés intelligentes par séquences et différents dossiers contenant eux-mêmes des mots-clés (un dossier inserts par ex contenant les mots-clés paysages, village, ciels etc). Différents mots-clés peuvent s’appliquer sur le même plan et l’outil de recherche est très puissant ce qui rend le classement des rushes extrêmement efficient.
-un événement Technique où je pouvais ranger à l’abri tout ce qui concernait les échanges avec l’équipe des VFX ou les exports pour les projections de travail.Après la synchro et l’établissement de la bibliothèque, j’ai copié celle-ci et transcodé les médias en proxy. Le passage des proxy vers les rushes originaux ou l’inverse se fait ensuite en seul clic sur FCP.
Je pouvais ainsi travailler chez moi sur les proxy, Philippe chez lui sur les natifs puis nous pouvions échanger notre travail en nous envoyant des XML par mail et FCP rétablissait le lien.
Ceci nous a bien servi, par exemple, quand je devais faire des manip purement techniques comme des stabilisations, des animations, de la colorimétrie un peu poussée ou des petits effets.
Petit bémol, il est impossible de faire un XML d’une partie seulement d’une timeline, je devais par conséquent faire une timeline à part pour envoyer un seul plan truqué.
Et pour le mixage son ?
La communication avec Protools pour le montage son a été très simple. Pas de confo puisque toutes les pistes du son direct synchro étaient dans le montage.
J’ai utilisé les « Rôles » de FCP et attribué un rôle à chaque groupe de sons : directs, sons seuls, ambiances, effets et musiques.
Les exports pour Protools ont été édités avec X2Pro, une application qui permet de transformer les XML de FCPX en AAF. On peut choisir quels rôles seront inclus dans l’AAF.
Effets spéciaux et étalonnage ont été traités comment, et quand, par qui et quoi ?
Les échanges avec l’équipe VFX des laboratoires Eclair ont suivi une procédure classique.
Je leur fournissais les plans à truquer avec un export de la séquence pour référence et les plans truqués étaient réintégrés à la timeline, au montage ou à l’étalonnage.
Comme nous montions avec les natifs, pour l’étalonnage, il aurait suffi de discuter avec le logiciel à travers un XML ou une EDL.
Mais nous n’avions que cinq jours… L’étalonneur (labo Eclair) est donc parti du pré-étalonnage réalisé sur FCP et a finalisé l’étalonnage sur Colorus. Pour cela, je lui ai fourni des exports des bobines en APR 444 en ajoutant à la fin de la bobine les plans pour lesquels il y avait un fondu (plan + poignées) ou un effet (iris par ex).
Pour que les équipes VFX et d’étalonnage aient accès à tous les rushes originaux utilisés dans le montage et aux effets appliqués dans la timeline (iris, resize….), j’ai créé une bibliothèque/bobine et utilisé la fonction rassembler en ayant configuré les réglages de la bibliothèque pour les rushes se trouvent dans un dossier externe.
Chez Eclair, ils n’avaient plus qu’à ouvrir ces bibliothèques sur leurs machines équipées de FCPX et ils retrouvaient, pour chaque bobine, le montage et les rushes originaux utilisés.
Comment Final Cut Pro X s’est comporté durant tout ce workflow et le montage ?
Final Cut Pro s’est vraiment bien comporté à toutes les étapes. Lecture en temps réel et travail fluide, pas de plantages. Bon, il faut dire que par sécurité, j’avais désactivé les rendus en arrière-plan, réglé la lecture sur meilleure performance, et exclu la bibliothèque de spotlight (j’ai lu quelque part que ça aidait parce qu’il ne passait pas du coup son temps à indexer mais je ne sais pas si c’est vraiment vrai).
Les avantages d’un workflow avec FCP, c’est bien sûr sa simplicité et la rapidité avec laquelle on peut commencer à travailler.
L’interface est très agréable et pratique, le classement des rushes extrêmement puissant, l’absence de pistes rigides prédéfinies peut dérouter mais à l’usage, c’est vraiment une très bonne idée.
C’est réellement un très bon outil.
Tout est plus fluide, plus instinctif , plus souple, sans perdre ni en précision ni en rigueur.
Le montage ne dépend pas de l’outil, et justement, FCPX en montage… se fait oublier.
Nathalie Sanchez
- assistante monteuse, conseillère technique, consultante et chef monteuse (selon les projets)
- consultante et assistante : long métrages de Philippe Ramos
- chef monteuse : documentaires, dont Buren dans la ville de Emérance Dubas, monté sur FCP X
- assistante monteuse du long A Uma Hora Incerta de Carlos Saboga
- assistante sur le documentaire My American (Way Of) Life de Sylvain Desmille
Contacter Nathalie Sanchez : par email
Formations suivies
- Formation Final Cut Pro Complet à Video Design Formation
- Formation Avid Media Composer initiation à Video Design Formation
- Formation After Effects initiation à Video Design Formation
- 1959. Au fond du panier qui vient de l’accueillir, la tête d’un homme guillotiné cherche à nous convaincre de sa relative innocence. Il raconte. Il était curé. Un curé singulier : son amour du Christ n’avait d’égal que celui qu’il offrait aux femmes. Fervent homme de foi, magnifique amant, son paradis terrestre ne semblait pas avoir de fin.
- Melvil Poupaud, Dominique Blanc, Diane Rouxel, Jean-François Stévenin, Jacques Bonaffé
- sortie prévue fin août 2015
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