Proposée à 2500 Euros HT, la Cinema Camera s’est fait attendre, pour des retards de fabrication et avec un grand désir des clients : plus de 70 000 pré-commandes en 2012 ! Et pour cause, à ce tarif-là, cette caméra enregistre sur SSD (recorder intégré, mais cartes SSD non livrées) en Full HD 4:2:2 10 bits peu compressé (ProRes ou DNxHD) ou en Raw 2,5k 12 bits 4:2:2. Elle est fournie avec le logiciel UltraScope (oscillo-vecteurscopes PC/Mac, en liaison live avec la caméra par prise Thunderbolt) et DaVinci Resolve, outil d’étalonnage qui permet notamment d’importer les rushes en Raw, de les développer, les exporter vers un outil de montage (Final Cut Pro X par exemple…) puis de conformer un montage et faire des sorties adaptées à une diffusion cinéma, en raw 12 bits…
A ce prix, c’est une affaire en or, une caméra avec une telle dynamique (12 bits).
La Cinema Camera est dotée d’une monture EF, pour que les 20 millions de vidéastes et cinéastes (oui, 20 millions ! dixit Canon…) de la révolution 5D puissent passer à la Cinema Camera en ne rachetant aucune optique…
Mais, il le faudra sûrement, car les grand-angles que l’on possède habituellement deviendront des 50mm ou petits télés : la Cinema Camera a un capteur de taille relativement petite, avec un crop factor de 2,3.
Un objectif de 28mm (X 2,3) devient un 64mm. Le célèbre zoom Canon EF-L 24-70 à 2,8, de haute qualité mais cher (2400 Euros TTC !), devient un 55-161mm : pas très utile, en tout cas pas l’objectif de base.
Le Canon EF-L 16-35 à 2,8 est une solution (= 37-80mm) mais encore assez couteuse (1348 Euros TTC).
Nous avons essayé la Cinema Camera avec un objectif Tokina : 11-16mm à 2,8. Lumineux et économique (550 Euros), il équivaut à un 25-36mm. C’est une solution ingénieuse, même si ça ne fera pas rêver les amateurs de cailloux onéreux et exceptionnels !
L’objectif Canon 24mm EF L à 1,4, très lumineux mais assez cher (1400 Euros TTC environ) sera un très bon choix pour cadrer des interviews, filmer des gens…
Petit bémol sur la monture EF : toutes les optiques de type EF (EF, EF-L, EF-S, Canon ou autres) ne marchent pas.
Evidemment, on peut les monter et l’image est là…
Par contre, quand ça ne marche pas, le diaphragme ne réagit pas : impossible d’avoir un diaph auto ou un diaph manuel. Et comme ces optiques sont commandées électriquement, sans bague manuelle, on reste sans voix…
Pour l’instant, aucune explication officielle et cela semble même bizarre, car les optiques non fonctionnelles se retrouvent dans toutes les catégories, économiques, haut de gamme…
On trouvera ici la liste des optiques compatibles ou non.
La caméra est compacte, d’un format rectangulaire, inhabituel, et assez dense, d’un peu plus de 2Kg, nue.
Elle sera très bien sur un pied, et peu adaptée à un tournage à la main. L’écran est trop gros pour pouvoir y fixer un viseur optique loupe; la caméra trop lourde pour la manier nue et à la volée.
Sinon, il faudra trouver la bonne épaulière, économique, et qui répartit assez le poids.
Les épaulières Zacuto (et autres…) très couteuses ne sont a priori pas vraiment une solution : cela rend la caméra encore plus lourde !
Il faudra trouver une épaulière qui répartisse le poids sur les épaules et la poitrine – à regarder du côté du constructeur Foton :
la crosse Foton Lit est à notre sens la meilleure. Légère, compacte et économique (145,75 Euros TTC !), elle stabilise la caméra par effet collier (sangle autour du cou) plus la colonne qui s’appuit sur le ventre, permettant de répartir le poids et stabiliser l’engin.
En mode ultra minimaliste, on finit par trouver un moyen d’utiliser/détourner les poignées (optionnelles). Ces poignées (165 Euros HT) permettent de la manipuler, sans plus… Car la caméra est trop lourde pour qu’on puisse longtemps la tenir d’une seule main et avec l’autre main faire le point… Mais en les fixant à l’envers, en ajoutant la courroie autour du cou et en passant une des deux mains sous la poignée pour contrôler l’optique, on parvient à viser, stabiliser, régler et tourner.
La Cinema Camera est livrée sans SSD (mais avec enregistreur interne); il faudra donc acheter des SSD.
Avec un SSD de 256 Go, compter environ 30 minutes en Raw, et 1h en ProRes.
Acheter des SSD de qualité, rapides. Par exemple les Crucial M4, à un bon prix chez Amazon : 100 Euros TTC environ le 128Go – attention: seul le 512 Go est compatible avec le débit du Raw – nous avons d’ailleurs noté des difficultés à enregistrer en ProRes sur un 256Go.
Voici la liste des SSD recommandés pour travailler en Raw :
- OCZ 240GB Vertex 3 (VTX3-25SAT3-240G)
- OCZ 480GB Vertex 3 (VTX3-25SAT3-480G)
- OCZ 240GB Deneva 2 (firmware 2.22) (D2CSTK251M21-0240)
- Crucial 256GB C300 (CTFDDAC256MAG-1G1) – discontinued
- Crucial 512GB M4 (firmware 009 or later) (CT512M4SSD2)
- Intel 335 Series 240GB SSD (SSDSC2CT240A4K5)
- Intel 520 Series 240GB SSD (SSDSC2CW240A3K5)
- Intel 520 Series 480GB SSD (SSDSC2CW480A3)
- Kingston 64GB SSDNow V+100 (SVP100S2/64G) – discontinued
- Kingston 128GB SSDNow V+100 (SVP100S2/128G) – discontinued
- Kingston 512GB SSDNow V+100 (SVP100S2/512G) – discontinued
- Kingston 120GB SSDNow V+200 (SVP200S3/120G)
- Kingston 240GB SSDNow V+200 (SVP200S3/240G)
- Kingston HyperX 240GB (SH100S3/240G)
- Sandisk Extreme 480GB (SDSSDX-480G-G25)
- PNY 240GB Prevail SSD (firmware 5.0.2) (SSD9SC240GCDA-PVL)
- OWC Mercury Extreme Pro 6G SSD (firmware 5.0.2) (OWCSSDMX6G240T)
- Crucial 256GB M4 (firmware 000F) (CT256M4SSD2) <<< aparement, c’est le notre celui là…
- OCZ Agility 3 240GB (AGT3-25SAT3-240G)
- Sandisk Extreme 120GB (SDSSDX-120G-G25)
Petit inconvénient : la caméra ne reconnaît (évidemment) pas un SSD neuf non formaté, et ne sait pas non plus les formater.
Il faudra donc le faire sur votre Mac, avant de partir tourner avec des SSD vierges et inutilisables !!!!!
Et donc il faudra aussi avoir un dock lecteur de SSD, comme celui-ci à environ 100 Euros TTC.
Un défaut assez gênant, pour ne pas dire angoissant, est la batterie intégrée, impossible à changer.
Elle se recharge en 2h environ, et tient seulement 1h environ…
Au delà de cette autonomie limitée, il faudra brancher la caméra sur le secteur ou bien brancher une grosse batterie (couteuse et lourde).
Pour les tournages cinéma, on imagine déjà que la caméra sera dédoublée, pour sécuriser l’alimentation et les autres risques possibles…
Jolie solution économique et légère : IKAN propose depuis peu de temps des petits adaptateurs pour relier une batterie de type Canon EOS ou Sony (Z1,…) à fixer à la ceinture. A 69 Euros HT cet accessoire, on pardonne ce défaut regrettable de la Cinema Camera !
Pour faire le point, on peut le faire directement sur la bague de l’objectif. Avec une optique économique, on disposera de peu de précision… Avec une optique de meilleure qualité, voire une optique cinéma, on obtiendra une bien meilleure précision.
On peut aussi ajouter un followfocus, manuel, HF… nos followfocus pour Canon 5D ont tout de suite marché, sans souci.
La Cinema Camera dispose d’une prise remote (type lanc).
Un accessoire compatible est le Manfrotto 512LX. Pour environ 380 Euros TTC, on peut télécommander mise au point, diaph, focale et enregistrement ! En accrochant cette télécommande près de soi (sur une tige, une cage,…), on peut gérer la prise de vues avec 2 mains de manière stable et très réactive.
La Cinema Camera est un peu bruyante : un ventilateur « ronronne » constamment.
Cela peut parfois être gênant, avec plusieurs caméras et des micros branchés sur la caméra, ou dans une ambiance totalement silencieuse. Sinon, cela reste acceptable.
Les réglages se font sur l’écran de monitoring, tactile.
Ils sont minimalistes (4 menus, environ 18 réglages), et on ne se perd dans aucun sous-menu !
9 boutons accompagnent cet écran tactile: record, iris (diaph) en push automatique, mise au point (peaking),…
La sensibilité de base est donnée pour 800 ISO, et peut se régler entre 200 et 1600.
La balance des blancs se règle par (gros) pas, entre 3200 et 7500 degrés Kelvin.
Manque inacceptable et incompréhensible : aucune balance manuelle !
On espère une mise à jour du programme interne qui corrige cela, rapidement.
Sur les menus, on choisira aussi entre les 3 formats (ProRes Full HD, DnxHD Full HD, ou Raw 2,5K), la dynamique (vidéo ou film), la vitesse d’obturateur (réglée en dégré d’ouverture, de 45 à 360 degrés), le zebra, la sortie vidéo (HD-SDI), les entrées son,…
Pour faire le point, il faut le faire manuellement !
En double « tapant » sur l’écran, on zoome sur l’image, ce qui peut aider.
En appuyant sur la touche Focus, on obtient une aide avec du peaking sur les arêtes devenues nettes.
Pour certains usages, il faudra sûrement équiper la caméra d’un viseur électronique. Zacuto et Cineroid en proposent (entrée HD-SDI obligatoire)… mais ça commence à 900 Euros HT environ…
Pour gérer le diaphragme, la Cinema Camera propose le bouton IRIS pour obtenir un push auto (un peu particulier). Sinon, les touches arrière et avance permettent de le régler, avec l’information du diaph depuis la version 1.2 du programme interne (mis à jour le 31/01/13).
La gestion du son a été critiquée.
Effectivement, la Cinema Camera ne dispose pas d’entrées XLR, mais de deux entrées en jack 6,35 (les gros). Il faudra donc acheter un adaptateur jack-XLR. Un très bon adaptateur est proposé par Wooden Camera et coûte environ 200 Euros TTC.
on notera qu’un simple câble XLR-jack (beaucoup moins cher), fonctionne parfaitement.
Et sinon, la mixette Fostex DC-R302 est un très bon accessoire : pour 800 Euros HT elle propose une alim fantôme, des vu-mètres, 3 voies, avec des entrées XLR-jack-rca, un enregistrement intégré sur carte, et elle se visse sous la caméra, de manière très compacte.
Par contre, le son est enregistré en non compressé. C’est quand même beaucoup mieux que les reflex. Et en fiction, ça ne sera pas forcément nécessaire.
Grosse lacune peu acceptable et difficilement gérable : l’absence de vu-mètres audio sur la caméra…
A part enregistrer le son séparément ou via une mixette, il semble difficile de savoir ce qu’on prend précidément et d’exploiter 100% de la dynamique audio.
On espère que ceci sera facilement ajoutable par mise à jour du programme interne…
Idem pour l’image, qui ne propose pas d’oscillo/vecteurscopes… On peut bien sûr brancher la caméra à un portable et utiliser le logiciel UltraScope… mais ça reste lourd ! Sinon, un bon viseur électronique (Cineroid) permettra d’analyser l’image tout en visant.
La Cinema Camera propose 5 cadences (23,98, 24, 25, 29,97 et 30 ips) en images pleines (pas d’entrelacement !), 3 codecs (ProRes, DNxHD, Raw) et 2 modes (vidéo et film).
En codecs « vidéo », ProRes ou DnxHD, on peut filmer en mode vidéo (10 bits linéaire).
Le diaph push auto descend l’image au maximum dans les noirs. L’image est superbe, assez clinique, très vidéo, mais très précise.
En mode film, le push auto colle au contraire l’image vers les hautes lumières au maximum, afin de pouvoir mieux exploiter les basses lumières, et minimiser le bruit.
C’est un mode log directement exploitable en montage (FCP X, Avid, Premiere), et avec 10 bits de profondeur couleur, on a une grosse marge de maneuvre pour jouer sur l’image, l’étalonner, la sauver,…
En Raw on tourne forcément en mode Film, et donc en 12 bits.
La Cinema Camera génère une série d’images fixes numérotées en codec Adobe Cinema DNG.
Il est nécessaire de passer par un outil de développement Raw pour monter et lire les séquences.
La caméra est livrée justement avec une licence de DaVinci Resolve, outil puissant d’étalonnage : on y importera nos plans en DNG, pour leur appliquer ou non une LUT, et travailler ou non leur image.
On les exportera ensuite vers un outil de montage, pour monter le film désiré.
A la suite de ceci, un petit export XML vers DaVinci permettra de faire une conformation en Raw, et de retrouver la profondeur 12 bits, étalonner/travailler l’image… pour enfin faire une sortie film – ou bien un autre export vers notre outil de montage si on diffuse en Full HD, mais qu’on veut profiter du 12 bits et de DaVinci.
En version Film, il se pose la question du workflow complet, avec trucages, transitions, titres, animations… car DaVinci appréciera peu ces subtilités et préfère un beau montage cut. Il faudra donc passer par After Effects ou Nuke, outils de trucage gérant le raw… ce qui implique un workflow assez contraignant.
On attend avec impatience un plug in permettant de gérer directement des rushes Raw dans notre outil de montage préféré (FCP X, Avid MC…) : pouvoir lire immédiatement le format, pouvoir contrôler l’expositiondvp du raw, pouvoir rester en raw durant tou le montage, jusqu’aux exports. Si RED l’a fait, BlackMagic Design devrait pouvoir le faire… le plus tôt sera le mieux !
Liste des manques actuels de la Cinema Camera (un peu dans l’ordre des priorités /réparables) :
- niveau audio
- oscillo/vecteurscopes
- affichage de l’obturateur en fraction de seconde (pour le moment uniquement en degrés)
- plus de valeurs de vitesses d’obturateur
- capacité du SSD encore enregistrable
- affichage des menus en surimpression et pas comme là en opacifiant l’image
- pouvoir au moins effacer un média/rushe
- pouvoir formater un SSD
- importer et monter directement des médias Raw dans Final Cut Pro X
- toutes les optiques de type Canon EF ne sont pas compatibles (le diaph n’est pas commandé) : pourquoi ? et déjà peut-on avoir une liste ?
- batterie non interchangeable
- entrées audio en jack et pas XLR…
- pas de viseur
- légèrement bruyante
Après 10 mois d’attente, passée l’euphorie (je l’ai je l’ai je l’ai !!!!!), je ressens une déception dans le manque d’ergonomie, et je suis presque en colère de voir que BMD n’a pas profité de ses problèmes d’attente de livraison pour améliorer les infos affichables (iris, vu mètres audio, oscillo).
Et effectivement, cette caméra est légèrement moins pratique qu’un Reflex.
Son capteur est gros et excellent, mais inférieur à ceux d’un 5D mark III ou d’une C300 (la C300, nettement plus chère… 12500 Euros HT !).
Ses deux formats d’enregistrement, en 10 et 12 bits, et son mode log produisent par contre des images magnifiques, exploitables avec beaucoup de profondeur en postproduction.
Vendue 2500 Euros HT, elle est une révolution face à la Red Scarlet, elle représente une chance pour d’innombrables cinéastes indépendants, et un outil d’imagerie haut de gamme pour nombre de vidéastes (expos, pubs, clip, doc,…).
Son accesoirisation n’est pas non plus si couteuse, si on est malin et raisonnable (se méfier des vendeurs d’accessoires hollywoodiens).
Enfin, je suis convaincu que les 5 prochaines années verront déferler la révolution BlackMagic Design, comme à une autre période lorsque le constructeur égrenait des matériels HD (cartes, boitiers, convertisseurs…) toujours moins chers et toujours plus puissants.
Je pense que cette Cinema Camera verra d’autres modèles arriver : avec plus de définition, plus de connexions, et des prix toujours plus bas.
Alors, bienvenue à la nouvelle Cinema Camera, tant attendue et promise, malgré ses erreurs de jeunesse, à un très bel avenir !
Pour voir un test d’images, regardez ce test comparatif de haut niveau (face à un 5D).
Un très bon revendeur BlackMagic, en très bons termes avec le constructeur, et qui vous proposera la Cinema Camera rapidement ainsi que tous ses accessoires (chers et pas chers) : ATREID.
Si vous avez des remarques, des liens, des propositions d’accessoires… contactez James Simon
Mise à jour du 31 janvier 2013.
BMD met à jour le programme interne de la Cinema Camera (gratuitement bien sûr, en téléchargement sur leur site), avec notamment l’affichage du diaph sur l’écran, une fonction de time lapse (intervallomètre), et le support du format ExFAT et du thunderbolt sur PC. Bravo !
© Video Design Formation / James Simon – 2013