AIFF est le premier festival de films générés par IA (intelligence artificielle, AI en anglais).
Ce premier « festival »* s’est déroulé du 21 au 22 mars à San Franscico.
*pourquoi mettre des guillemets à ce « festival » ? cet événement ressemble plus à des moments de rencontres et projections, et comme il est financé et organisé par une unique société, qui travaille des outils utilisés et promus par les films présentés, on ne peut que mettre quelques guillemets à leur festival !
Le AIFF est financé par la société Runway, éditrice d’outils IA :
Pour 12 dollars (USD) par mois on utilisera leur trentaine d’outils créatifs / « génératifs » par IA, dénommés dans leur ensemble « Gen-1 » : des outils de création, modification, fusion, image ou vidéo…
Avant de regarder le film qui a reçu le grand prix, et les autres films primés par le AIFF, il faut bien voir qu’il reste des humains, survivants (face aux IA), aux visages et aux corps bien réels, banals… les auteurs de ces films :
On imagine, à raison, des films aux imageries et univers fous…
…délirants, libres de quitter nos humanités corporelles aux besoins terrestres (manger, se vêtir, travailler, souffrir, mourrir…), entre Dali et Bunuel, fabriquant des avatars d’Avatar, mille fois plus fous, avec juste quelques ordinateurs et le vol des droits d’auteur et du travail des humains… [on peut d’ailleurs visionner le court débat entre réalisateurs humains de ce festival, créatifs et bien humains…]
Après la cuisine moléculaire et le développement délirant de la chirurgie esthétique…
l’imagerie générée par IA semble l’évolution délirante de ces tentations humaines de métamorphoser l’humain en un Dieu surpuissant, anihilant les limites de nos corps, des frontières, des droits et devoirs humains…
Les films présentés à l’AIFF, très courts (maxi 10 minutes) sont en tout ou partie générés par IA…
…en tout cas écrits et désirés par au moins une personne. Il nous reste encore cela, pour ressentir la présence d’un point de vue, avant le Grand jour tant redouté où des IA décideront de créer sans même un humain aux commandes…
Dans certains cas on imagine un auteur écrivant (ou décrivant) ses désirs d’images, musiques, voix à des applications (qui existent désormais et continuent de se développer), pour générer paysages, personnages, sons et musiques… à partir des milliards d’images et sons existant sur le web, les mélangeant, fusionnant, inventant une cosmogonie et une esthétique impossible, surnaturelle.
On imagine aussi un problème et une question…
Avec le problème déontologique des droits bafoués des auteurs des images pompées par les IA, afin de pouvoir créer une merveilleuse terra incognita… (mais les IA se basent sur les milliards d’images, sons, vidéos, textes produits par des auteurs et disponibles sur le web, pour « comprendre », mouliner et fabriquer des images « générées par IA ».)
Avec l’autre question, celle du travail : le travail éliminé des ouvriers du cinéma, remplacés par des data centers et le pompage de ces milliards d’images existantes.
Certains films primés utilisent par contre seulement en partie l’IA, pour générer des imageries autour d’un acteur réel…
Generation, grand prix du AIFF, réalisé par Riccardo Fusetti :
On ne sait pas comment Riccardo Fusetti a produit son personnage « haut en couleurs ».
L’essayiste Mascha Deikova (site CineD) pense qu’il doit s’agir d’un outil comparable à Gen-1 qui génère des VFX à partir de vidéos réelles.
Checkpoint de Aron Filkey & Joss Fond, questionne l’évolution des techniques de représentation…
Les auteurs retraversent l’histoire des arts et techniques de représentation (notamment l’arrivée de la photo qui a bouleversé la peinture), pour insérer (légitimer !??) l’IA et la questionner, ainsi que faire réfléchir à ce que nous voyons et entendons : cette voix off, qui est-elle ? de qui vient-elle…? car au pays de l’IA, tout se choisit…